BOSNIE-HERZÉGOVINE RÉFUGIÉS: UN MÉDECIN ACCUSE
Dimitar Anakiev est médecin, ancien réfugié lors des guerres qui ont détruit la Yougoslavie dans les années 1990. Il travaille dans les camps de réfugiés des Balkans, qui accueillent ceux que la guerre en Afghanistan, en Syrie ou en Irak a chassés. Le docteur Anakiev accuse : ce sont les droits de l’homme les plus élémentaires qui sont refusés aux réfugiés et ce sont les gouvernements des grandes puissances et les institutions internationales qui en portent la responsabilité.
Environ 4 000 réfugiés et migrants sont pris dans un piège monté par les autorités des Nations unies et des États-Unis dans leur protectorat de Bosnie-Herzégovine. Les prétendues « organisations humanitaires »qui en dépendent, censées être financées pour aider les gens, font tout pour rendre la vie des réfugiés insoutenable, pour qu’ils retournent « volontairement » d’où ils sont venus. Les droits de l’homme – tels que consignés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme – sont violés par ceux qui sont censés les défendre.
Article 5 – « Interdiction de la torture, de traitements et punitions inhumains »
Le droit international considère le refus systématique d’assistance médicale comme un acte de torture. En Bosnie, dans les camps dirigés par les agences des Nations unies, les gens meurent parce qu’ils sont privés de soins médicaux et beaucoup risquent de rester handicapés car leurs maladies ne sont pas correctement traitées. En plus, des réfugiés et des migrants font l’objet d’abus physique de la part de policiers des pays voisins et des services de sécurité privés dans les camps des agences des Nations unites:
Article 13 – Le « droit à la libre circulation»
Les réfugiés et les migrants en Bosnie-Herzégovine sont interdits de transport public. Un migrant de Kladusa avec une ordonnance du médecin pour se faire faire un diagnostic médical à Bihac (à une soixantaine de kilomètres – ndlr) ne peut s’y présenter s’il n’est pas transporté par les agences des Nations unies, qui ne le font presque jamais. En revanche, une personne privée peut être accusée de violer la loi si elle aide à transporter un réfugié. Nous connaissons un patient à Kladusa qui attend d’être transporté à l’hôpital de Bihac depuis plus de deux mois et demi ! Même s’il a tous les documents nécessaires et l’argent, l’agence humanitaire responsable du transport refuse de le transporter.
Article 14 – Le « droit d’asile »
Des frontières infranchissables, des policiers qui frappent, humilient et kidnappent des migrants sont des pratiques répandues dans les États membres de l’Union européenne. Les médias en ont rendu compte.
Article 25 – Le « droit à la santé »
Réfugiés et migrants constituent un groupe vulnérable, comprenant des handicapés, des femmes et des enfants, des personnes âgées. Mais leur santé et leur vie sont menacées par la politique de réduction des soins médicaux pour les migrants (c’est la « marque de fabrique » de l’Union européenne, critiquée maintes fois, y compris par les responsables des Nations unies). À cela s’ajoute qu’en Bosnie-Herzégovine la loi Santé, qui autorisait l’accès au système de soins aux réfugiés et aux migrants, a été suspendue par une directive venue des autorités. Les soins médicaux de première nécessité ont été remplacés par une assistance humanitaire occasionnelle. Cette assistance n’a pas pour tâche de traiter les malades : elle a essentiellement pour but de montrer qu’elle existe… disposant dans le meilleur des cas de cachets de paracétamol (…). Pour conclure, ajoutons que dans les camps de réfugiés l’hébergement est inapproprié, la nourriture insuffisante et de très mauvaise qualité (des centaines de personnes restent sur leur faim après avoir passé des heures à faire la queue pour de la nourriture chaque jour). Il y a un nombre insuffisant de douches – à peu près 50 % de moins que ce qui est prévu par les normes – un grand nombre de douches ne fonctionnent pas et l’eau chaude est rare. Ce tableau d’ensemble manifeste la volonté politique de violer les droits de l’homme et de maintenir un système qui empêche la vie dans les camps pour migrants et réfugiés.
Dimitar Anakiev, docteur en médecine
La Tribune de Travailleurs, Paris, 6.2.2019
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